Pierre Perret, c’est fou.

Pierre Perret

Prenez trois mots au hasard dans le dictionnaire : violon, piston, seins. Confiez-les à Pierre Perret, il vous les assemble pour fabriquer une ode à la beauté mammaire de la gente féminine.

Elle avait des seins comme des violons
Et moi j’en jouais comme du piston
Mes airs mélodieux faisaient jaillir de ses yeux ronds
De gros sanglots longs sur ses violons

Pierre Perret – Les Seins

Non, mesdames, ne commencez pas à hurler au sexisme. Ces quelques vers n’ont que vocation à célébrer et vénérer ce qu’il y a de plus beau sur cette terre, c’est à dire vous, les femmes, vous le charme, vous les anges, adorables.

Putain ce blog part en couilles. Après Benjamin Biolay, Yvette Horner et André Verchuren, v’la l’Pierrot qui alunit dans ces colonnes. Oui, et alors ? Et non, il n’est pas mort. Pas encore.

Pierre Perret à l'Olympia

Pierre Perret live

J’écoutais toujours avec grand plaisir et en intégralité cet album de Pierre Perret enregistré à l’Olympia. C’est gai, frais, joyeux et la bande de copains sur scène a vraiment l’air de bien se marrer. Outre les standards du Pierrot, j’ai découvert Blanche sur ce disque. Plus tard, pour mes enfants, j’ai mêlé aux comptines de chiards perverses et lubriques (j’ai appris que toutes ces chansons pour enfants avaient un sens caché un brin pornographiques !), celles beaucoup plus poétiques du Perret.

Pierre Perret est un monument de la chanson française, peut-être un peu sous-estimé. Un auteur se jouant des mots, jamais vulgaire mais rigolo avec lesquels il raconte la vie l’amour, la société. Un vrai poète. Un poète tendre, un tantinet lubrique parfois. Il s’amuse avec le Q et les autres lettres et avec les notes. Il observe la société et en tire des chroniques de la vie ordinaire avec les mots des gens ordinaires. Ceux prononcés au zinc du café d’en bas.

Il n’est pas un grand chanteur. Non. Reconnaissable, oui. Il chantonne ses histoires avec dans la voix toujours le rire ou toujours les larmes, c’est selon. Il fait partie de ces chanteurs à guitare sur le genou avec le pied sur le tabouret, comme Brassens. Il fait bondir sa main sur les cordes de son instrument, les yeux pétillants, le nez en trompette, les joues du bon vivant.

Il aura fait marrer des générations en expliquant Le Zizi, Les Baisers, Les Seins racontant Les Jolies Colonies de Vacances, le retour de Tonton Cristobal, la bouffe au Tord Boyau :

Dans le quartier même le mois le plus doux
Tu n’risques pas d’entendre miaou
Des greffiers mignons y en a plus bezef
Ils sont tous devenus terrine du chef

Pierre Perret – Le Tord Boyau

Il aura écrit des images. Mais rien n’est figé chez Perret. Allez voir plus loin que le bout de votre nez et découvrez l’empire du sens caché dans la moindre de ses paroles.

Dépêche toi mon amour
Je suis garée en double file

Pierre Perret – Dépêche-toi mon amour

Certains prendront au pied d’la lettre ces quelques mots, imaginant pépère assis dans l’auto, warnings allumés, attendant mémère partie à la boulangerie se payer une miche. Et bin pas du tout. C’est mémère qu’est pressée de se faire ramoner la ch’minée.

Et puis y a le baiser d’Zézette
Le plus salé le plus sucré c’est le plus chouette
On dirait un chausson aux pommes
Langue de velours palais d’amour on la surnomme
Je l’aime
Elle m’aime

Pierre Perret – Les Baisers

Bien sûr, Zezette c’est sa fiancée dont il est fou amoureux et il ne peut se repaître des baisers d’Zézette. Oui, oui, ne soyons pas tordus. Ne pensons qu’à l’amour, le vrai, le sincère, le fougueux. D’ailleurs, c’est ce qu’il dit : « Je l’aime, Elle m’aime ». Pas d’ambiguïté. Alors stop ! N’essayez pas de me faire écrire ce que vous pensez tout bas. Passez votre chemin obsédés et pervers !

Pierrot triste Perret

Mais Pierre Perret n’est pas que calembours, gaudrioles et billevesées. Il a écrit également une des plus belles chansons, si ce n’est la plus belle sur le racisme : Lily. Chanson qui recevra le Prix de la Ligue Contre le Racisme et l’Antisémitisme et dont le texte sera étudié dans les écoles et pas que dans celles qui portent son nom (et il y en a un paquet !)

Sur la guerre toujours d’actualité, La P’tite Kurde.
Il a offert ses mots de colère aux Femmes Battues

Tant qu’les voies de fait sont bénignes
Des blessures ouvertes ou des bleus,
Pour nous, policiers, la consigne
C’est de n’pas sévir pour si peu.
S’il vous étouffait sous la couette,
S’il vous étranglait de ses mains,
Nous pourrions ouvrir une enquête,
Vous n’seriez pas morte pour rien !

Pierre Perret – Femmes Battues

A la femme grillagée :

Jeunes femmes, larguez les amarres
Refusez ces coutumes barbares
Dites non au manichéisme
Au retour à l’obscurantisme
Jetez ce moucharabieh triste
Né de coutumes esclavagistes
Et au lieu de porter ce voile
Allez vous-en, mettez les voiles

Pierre Perret – La Femme Grillagée

Il est l’auteur de très belles chansons d’amour tissées de vers que n’auraient reniées ni Verlaine ni Hugo. Il a aimé Jeanne, Estelle, Blanche, Adèle, le cul de Lucette, la p’tite Julia et bien d’autres leur offrant rimes pour déclamer son feu.

Blanche était un volcan c’était plus qu’une flamme
Un brasier que nul homme n’avait pu allumer
Moi j’ignorais ses dons je ne sais rien des femmes
Et je n’ai su qu’après que j’étais le premier
Que ma plume aille droit s’il faut que je l’écrive
Tandis que ses seins ronds échappaient à mes mains
Que ses cuisses fuyaient comme deux truites vives
Moi fou déconcerté je n’y comprenais rien

Pierre Perret – Blanche

J’ai même bien aimé sa petite ritournelle toute en finesse sur le confinement. C’est bien torché. C’est bien poétique. C’est fin, ça se mange sans faim. Contrairement à celle de Renaud sur le Corona qui aurait été plus inspiré d’en torcher une sur le pastis, non ? C’est peut-être ça la différence entre un épicurien et un pochtron.

Et puis y’a le baiser d’Zézette

Je voudrais quand même revenir sur Zézette.
Vous allez dire que j’ai l’esprit bien placé, mais bon, après les langues entrelacées, vous n’avez pas une petite envie de descendre lentement, de passer entre les deux monts Sans Souci, vous attarder un peu sur les sommets ? Puis continuer doucement et tendrement la chute vers celle des reins pour goûter au plus salé, au plus sucré et au plus chouette de tous les baisers ? Vous restez de marbres ? Vous n’en avez pas envie ? Moi si !

Pour tout savoir sur le passé, le présent et l’avenir de Pierre Perret, il a un site très bien fait. C’est ici.

Un commentaire Ajoutez le votre

  1. blackbonnie64 dit :

    Pierre Perret est INDISPENSABLE! Infatigable trousseur de calembours, talentueux amoureux des mots, il fait partie du patrimoine culturel au même titre que Brel, Brassens, Gotainer et tous les autres… sauf Maitre Gims.

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