Je sais pas vous mais moi, si j’habitais Lyon et que j’aime le cinéma, une manifestation comme le festival Lumière me conviendrait tout à fait. Ne faites pas les ignorants : vous savez pas c’que c’est, le festival Lumière ? Quuuuuuuuuuoi ? Ils savent pas c’que c’est ? À lire un peu dans le ton de Quuuuuuuuuoi ? Un nouvel Omo ? Enfin, vous voyez, la honte, quoi.
Dix années Lumière
C’est que ça fait quand même dix ans que ça existe, le festival. Avec les soussous de la ville et de ce qui était à l’époque l’agglomération, devenue depuis métropole, Thierry Frémaux, l’Institut Lumière (qu’il dirige) et Bertrand Tavernier (président du même institut) ont décidé d’honorer chaque année une personnalité du cinéma mondial en lui remettant un prix Lumière, en lien évidemment avec les inventeurs du cinéma. En parallèle, outre une rétrospective de la personnalité en question, d’autres coups de chapeau sont rendus et de nombreux acteurs et cinéastes viennent présenter la programmation dans toutes les salles de la Métropole. Si je vous dresse la liste de tous ceux qui ont reçu le prix Lumière, vous n’allez pas me croire ou grincer des dents de rage. Des noms qui semblaient être à des années-lumière de la cité rhônalpine. Clint Eastwood, Milos Forman, Gérard Depardieu, Ken Loach, Quentin Tarantino, Pedro Almodovar, Martin Scorsese, Catherine Deneuve et Wong Kar-wai, tous sont venus arpenter la ville et profiter de sa gastronomie. Et parler, aussi, de cinéma.
Dernière invitée en date, Jane Fonda nous a honorés de sa présence la semaine dernière. Et pas seulement elle. Tout au long du festival, ont débarqué dans la ville Liv Ullmann, Javier Bardem, Alfonso Cuaron, Biyouna, Bernard Lavilliers, Claire Denis, Vincent Lindon et Claude Lelouch, venu le jour de l’ouverture en compagnie de Jean-Paul Belmondo et Richard Anconina. Ce soir-là, les célébrités étaient aussi nombreuses qu’à un festival de Cannes. C’est dire. Il faudrait encore citer le cinéaste Peter Bogdanovich qui devait présenter plusieurs de ses films. Sitôt arrivé à Lyon, il s’est cassé la jambe et a passé à suivre le reste des honneurs sur la télé locale de son hôpital.
Festival Lumière, le Cannes lyonnais
Le festival Lumière est basé, comme Cannes d’ailleurs, dont Thierry Frémaux s’occupe également, sur la pléthore. L’accumulation. L’asphyxie, même. Il faudrait pouvoir vivre 36 heures par jour ou se couper en quatre afin de tout voir. Et encore, ce serait dur. Mais, c’est bien connu, un festivalier heureux est un festivalier frustré. Qui se dit qu’il fera mieux l’an prochain. Qu’il dormira moins, mangera moins pour gagner du temps sur les séances. Qu’il déposera davantage de jours de congé afin de mieux profiter. Moi, entre nous, si je m’autorisais, je passerais mon temps à courir d’un film à l’autre. Et si je motorisais, j’irais en voiture, of course.
Le maître mot de Lumière est le patrimoine, célébré par les ambassadeurs du festival. Ils se nommaient, cette année, Abd Al Malik, Fatih Akin, Juan Antonio Bayona, Jean Becker, Dominique Besnehard, Clotilde Courau, Jean-Loup Dabadie, Béatrice Dalle, Mylène Demongeot, Rossy De Palma, Françoise Fabian, Marina Foïs, Laurent Gerra, Robert Hossein, Christophe Lambert, Jeunet et Caro ou Elsa Zylberstein, on ne peut tous les citer. Ils ont pris leur bâton de pèlerin pour parcourir les cinémas de la ville et de ses banlieues et parler des films qu’ils venaient présenter et avec lesquels ils n’avaient, très souvent, aucun lien. C’était juste des films qu’ils aimaient.
Vivement la prochaine édition
La cinéphilie ou, mieux encore, l’amour du cinéma est certainement le moteur de la manifestation. Si vous aimez le cinéma muet, avec la musique jouée par un pianiste ou tout un orchestre, si vous vous passionnez pour les films du passé et même ceux du présent, puisque plusieurs avant-premières étaient programmées, si ça vous fait marrer de voir Javier Bardem plaisanter avec vous avant la séance de « Biutiful » ou James Thierrée, le petit-fils de Chaplin, faire semblant de se casser la figure pour parler de « Certains l’aiment chaud », si vous êtes émoustillé lorsque Jane Fonda, juste avant que ne commence « Barbarella », vous raconte comment a été tournée la séquence inaugurale du strip-tease, alors oui, franchement, préparez-vous déjà à acheter les billets de la prochaine édition. Parce qu’il n’y en aura pas pour tout le monde.