Décidément, Pocket (maison d’édition en livre de poche) m’étonnera toujours. Je croyais que cette auguste société (j’essaie de me rattraper, je ne sais pas si ça va marcher) n’avait en sa possession que les droits d’auteurs de POLARS obscurs, et que seuls les livres du génial Robert Crais avaient l’honneur de se balader dans nos pockets trouées.
Et bien non, il y en a au moins un autre, c’est Lee Child (auteur américain également). Son “Carmen à mort” (Titre original : “Echo burning” !!) est tout simplement remarquable.
My name is Reacher, Jack Reacher
L’enquêteur fétiche de Lee Child : “Jack Reacher”, n’est ni flic ni détective privé. C’est tout simplement Jack Reacher, le type qui bouge tout le temps, le civil sans domicile fixe. Jack c’est un nomade, il adore voyager : en autostop, dans les cars Greyhound et les trains express. Et comme il lui arrive toujours quelque chose de pas clair, c’est vrai qu’on ne le voit pas sortir de chez lui le matin pour aller acheter sa baguette et regarder sa boite aux lettres en revenant.
Jack Reacher est gentil mais pas trop. Quand la coupe est pleine il rentre dans le lard. 1,95 mètre pour 120 kilos : ça ne l’empêche pas d’être rapide comme l’éclair et tranchant comme un pro du close combat.
Pourtant, on s’aperçoit vite dans “Carmen à mort” que Reacher est un mec assez fin in fine. Autant il peut être brutal quand il tape sur un gus, autant il est plein d’humour en d’autres circonstances.
Bref, le mec très cool mais qui sait vite s’adapter à des situations nouvelles.
Parce que faut pas croire, il y a du vécu tout plein dans ce livre : “…..le sherif rentra par la porte des toilettes, s’arrêta un instant en reconnaissant Reacher, et vérifia bien qu’il avait refermé sa braguette…..”
Et puis Jack Reacher c’est le mec hyper intelligent. Quand il réfléchit intensément, et qu’il se met à penser à la place des méchants, il arrive à retrouver le motel où les méchants sont descendus dans un rayon de 60 kilomètres à la ronde !
L’amour est un oiseau rebelle
Je l’aime bien Jack car il est très respectueux avec les dames. Mais quand il est dans son trip, pas de tergiversation. Il enchaîne les questions directes et ouvertes. En deux coups de cuillers à pot, il obtient ce qu’il veut, ou pas. Il collecte ou il élimine le Jack, mais il avance, il avance toujours.
Le scenario de “Carmen à mort” est subtil et complexe à la fois. Ce serait fastidieux de vous le narrer ici, pour moi surtout.
Tout au long de ce polar qui mélange les ingrédients et donc les saveurs du genre, j’ai fait un peu plus connaissance avec le Texas du sud, celui qui longe la frontière mexicaine sur plus de 1000 kilomètres. Où les vieilles familles texanes font la loi et rendent la justice avec ou sans l’aide de la police. Dans ce livre d’ailleurs, la police locale est pourrie et la justice aussi.. Ce Texas raciste en a marre de voir débarquer les “mex” qui viennent piquer le travail des locaux. On n’a pas de mal à l’imaginer ce malaise social : il existe partout….. Mais la version sud-Texas, c’est qu’il fait 40° à l’ombre dès la fin mai.
Pour en remettre une louche sur la justice, il me revient en mémoire une très belle citation de Lee Child paraphrasant Honoré de Balzac (et oui ! Ce monsieur a des lettres) :
Les lois sont des toiles d’araignée qui n’attrapent que les petites mouches et laissent passer les grosses.
Lee Child
A la page
Franchement, quelle découverte pour moi que ce Lee Child ! Les mordus du polar le connaissent bien sûr car il en a déjà sorti un paquet de bouquins avec son héros JR.
Autant vous prévenir, vers la page 270 on se dit merde ! L’intrigue a été pressée comme un vieux citron et là on ne voit pas bien où le père Child pourrait encore nous emmener car Jack Reacher, mené en bateau, humilié, et vexé comme un pou, ne réagit plus. Damned ! Que pasa hombre ?
Mais non ! tel Olivier Giroud marquant à la 93 ème minute le but de la victoire après une reprise du genou, détournée par un défenseur adverse dans ses propres filets, Jack rebondit et trouve la faille dans les explications qu’on essaie de lui faire avaler. Oh la la ! Quel plaisir de retrouver notre Jack offensif
Bon…. Faut dire aussi que tu sens avec tes doigts qu’il en reste encore pas mal de pages et qu’il n’est pas possible que ça s’arrête là.
Ce livre a du être lu par pas mal de gens car vers la moitié de la reliure, les feuilles se détachent. Si tu ne fais pas gaffe c’est rapidement le bazar. Malgré mes doigts gourds, vous auriez vu avec quelle attention, quelle prudence, quelle habileté j’ai tourné ces pages volantes ! Comme si la fragilité de la reliure allait de pair avec la qualité du contenu.
Lee Child : “Carmen à mort” chez Pocket. 410 pages.