En allant voir le film de James Mangold – « Le Mans 66 » (Matt Damon et Christian Bale dans les rôles principaux) – les dingues de bagnoles ont du se faire une belle montée d’adrénaline jusqu’à la chute finale. Oui, le montage du film est serré, très serré, les mouvements de caméra nerveux à souhait et le son est particulièrement travaillé. (Merci au CGR pour sa salle ICE Immersive. Manquait plus que les odeurs d’essence et d’huile moteur pour être totalement immergé).
De la bagarre sur les circuits il y en a énormément bien sûr dans ce biopic avec dans le rôle du furieux : Ken Miles (Christian Bale), beaucoup plus furieux que fou, quoique…. Bien tempéré par son ami Caroll Shelby (Matt Damon), seul pilote américain vainqueur des 24 heures du Mans avant 1966, bref : un héros national.
Avec les vroum-vroum, la mécanique, les règlages moteur, les 24h de Daytona, la ligne droite des Hunaudières, et les freins qui chauffent, «Le Mans 66» c’est aussi la volonté d’un homme qui veut sortir l’entreprise Ford et ses milliers de salariés de l’ornière que la baisse des ventes commence à dessiner.
Ford contre Ferrari
Comment ? Henri Ford II se laisse convaincre par Shelby et décide de se lancer dans la compétition en créant de toutes pièces Ford Sports. Le grand défi c’est la victoire aux 24 heures du Mans car en 1966, Le Mans c’est (depuis un moment d’ailleurs) le graal des pilotes d’endurance. Sur le mythique circuit, c’est Ferrari qui truste les titres. «Ferrari ! Des italiens qui fabriquent autant de voitures en un an que Ford en un jour ! Et pourtant ils gagnent ! » Il faut que ça cesse.
Henri Ford II va donc mettre sur la table un gros paquet de cash pour atteindre deux objectifs : la victoire aux 24 heures du Mans et le «revival» de Ford. Un des ses proches conseillers lui a dit : «Monsieur, un succès de Ford au Mans et les gens voudront s’approprier une petite part de cette victoire : ils achèteront nos modèles».
Honnêtement, Ford aurait préféré s’appuyer sur l’expérience de la Scuderia Ferrari mais l’offre de rachat faite à Enzo Ferrari ne lui a pas plu, mais pas du tout, et l’entrevue avec le Commendatore tournera court. On apprendra quelques temps après le rachat de Ferrari par la Fiat.
Le goût du défi a alors pris celui de la revanche pour la firme de Detroit.
Chauffeur à la maison !
Mais que faire de Ken Miles dont Caroll Shelby affirme qu’il est le seul pilote US à pouvoir gagner Le Mans ?
« Il se trouve à des années lumière de l’esprit Ford, on ne peut pas le contrôler. Regardez comment il s’habille ! Imaginez qu’il aille sortir devant les médias des âneries ou des paroles blessantes pour la marque. Non, on ne veut pas de Miles, il est trop pur !» disent à Shelby les patrons de Ford.
Caroll Shelby va pourtant parvenir à ses fins après un premier échec de Ford au Mans en 1965 (sans Ken Miles) et une nouvelle victoire de Ferrari.
Miles sera la star des 24 heures du Mans 1966 après une arrivée mise en scène par les dirigeants du constructeur pour montrer la force et la cohésion du groupe.
Ce film exploite largement la confrontation permanente entre d’un côté la toute puissance de la marque automobile, la suffisance de ses dirigeants et leur ignorance du sport automobile, et de l’autre la passion qui anime le metteur au point génial qu’était Ken Miles et celle de son pote Shelby, jamais à bout d’arguments pour convaincre.
Le Mans 66
Le tout en 1966, il y a plus de d’un demi-siècle.
Belle reconstitution d’époque de la part de James Mangold même si les dialogues en VF de Ken Miles sont poussifs voir grotesques. On se demande parfois si le type qu’on entend parler est bien le même que celui qui gagna Daytona et Le Mans en 66. Dommage, ça gâche un peu…