Festival Lumière 2022
Aujourd’hui, j’ai rendez-vous avec… mais attendez, il faut je vous raconte d’abord le début de cette histoire. Tout a commencé par un mail, reçu une dizaine de jours avant le démarrage du festival Lumière, à Lyon. Ce courrier, provenant d’une attachée de presse parisienne, m’annonçait que je serais probablement accrédité au festival et que j’aurais alors la possibilité de rencontrer Monica Bellucci. Laquelle viendra présenter le film « The Girl in the Fountain » d’Antongiulio Panizzi, double portrait d’elle-même et d’Anita Ekberg, l’actrice de « La Dolce Vita ». Étais-je intéressé ?, concluait ledit message.
Moi, vous me connaissez — ou peut-être pas, finalement —, mon sang ne fit qu’un tour. Je sentais plus que jamais vibrer ma fibre journalistique, toujours à traquer le scoop, privilégier la rencontre, obtenir des données à la source.
Bref, j’avais rendez-vous avec Monica mais ne savais encore ni où ni quand. Et c’est là que les choses se corsèrent, comme on disait du temps des pirates. L’interview avec l’actrice était programmée en même temps que la conférence de presse de Tim Burton, récipiendaire du 14e prix Lumière. Et s’il y en avait un qui en avait bien besoin, d’un récipient d’air, c’était moi car je manquais de souffle. Il allait me falloir choisir entre Tim et Monica, c’était dur. Finalement, je décidais d’assister au début de la conférence de presse de Tim Burton, puis de courir au rendez-vous avec Monica. Cela avait tout du biathlon mais ça valait le coup d’être tenté.
Dans une pièce du Village du festival, installé dans le parc du château Lumière, Monica m’attendait. Enfin, moi et les deux jeunes journalistes qui m’accompagnaient. Elle nous accueillit avec un gentil sourire, prête à répondre au flot de nos questions dans un temps donné, puisque c’est le principe de ces press junkets, comme les appellent ceux qui ne prennent jamais la peine de traduire les anglicismes. Les questions se suivent et se ressemblent forcément, puisque le journaliste ne dispose en tout et pour tout que de dix bonnes minutes — douche non comprise, remarquerait un émule de Chirac et de Pablo Mira — et n’a pas vraiment le temps d’entrer dans le vif du sujet.
Monica Bellucci, professionnalisme et gentillesse
L’exercice exige, de la part de l’artiste qui se prête au jeu, un réel professionnalisme et une gentillesse tout aussi évidente pour ne pas envoyer bouler tout ce petit monde. Et, c’est une certitude, Monica a été professionnelle et gentille. Et a parlé de son métier avec beaucoup d’intelligence.
« Une carrière d’actrice est liée à un âge biologique. À une certaine époque, à mon âge, les actrices ne travaillaient plus depuis longtemps. Il fallait aussi qu’elles n’aient pas d’enfants, sinon cela leur enlevait leur image de femme désirable. Dans le film, on me voit faire la cuisine et, à la sortie du théâtre, mon enfant m’attend. C’est la vraie vie ! Pour ma part, j’ai fait ma vie, j’ai cherché à me protéger, à avoir mon jardin secret. On crée quelque chose qui n’existe pas ! Une icône est une image figée dans le temps. Moi, je veux être une comédienne. Je change dans la vie, je veux changer à l’écran. »
Vous sortez de là le cœur battant, ébloui, comptant sur vos doigts les minutes qu’elle vous a accordées. Monica, j’en suis sûr, serait restée plus longtemps à discuter mais, que voulez-vous, le temps pressait, d’autres attendaient. C’est la vie.
Dernière chose : cet article est illustré de photos tirées du film ou de Monica remettant le prix Lumière à Tim Burton, ce qui se déroulait la veille de notre rencontre. Et j’y étais aussi. À l’issue de l’interview, on lui a demandé si l’on pouvait la photographier. Elle a refusé de poser seule pour des images qu’on publierait mais a accepté d’être immortalisée avec chacun d’entre nous. Et cette photo, ça risque pas que je la publie.